La feuille de plantain (Plantago spp.) est l’une de ces « mauvaises herbes » merveilleusement utile que l’on trouve partout dans le monde. Le plantain est souvent considéré comme une plante envahissante qui prospère dans les sols perturbés ou compactés. Il existe différentes espèces dont trois courantes: le plantain majeur (P. major), le plantain lancéolé (P. lanceolata) et le plantain badasson (P. sempervirens). Ces herbes ont suivi les migrations humaines depuis l’Europe et l’Asie, et se sont désormais implantées dans la plupart des régions tempérées et subtropicales du globe. J’aime le plantain lancéolé car on le trouve très facilement dans ma région.

Utilisation externe du plantain

De nombreux herboristes connaissent bien l’usage du plantain comme plante de premiers secours sur le terrain, où la feuille fraîche est mâchée et appliquée directement sur la peau pour soulager piqûres, morsures, brûlures légères ou petites coupures. C’est aussi un excellent moyen d’extraire une écharde, des fragments de verre ou autres débris indésirables ! Cette pratique traditionnelle du « cataplasme de salive au plantain » nous enseigne plusieurs choses importantes. D’abord, que le plantain pousse partout : dans les champs, les jardins, les arrière-cours, les haies et les lisières boisées d’Europe, d’Amérique du Nord, d’Asie et d’Afrique du Nord. Vous trouverez une espèce de plantain presque partout où le climat est tempéré. L’une des raisons pour lesquelles ce remède populaire est si connu (en plus de son efficacité !) est tout simplement que le plantain est omniprésent.

Cet exemple simple montre bien certaines des principales propriétés du plantain : apaisant, anti-inflammatoire, vulnéraire (cicatrisant), et aux vertus astringentes et rafraîchissantes . Si le cataplasme mâché ne vous convient pas, sachez que la feuille de plantain fonctionne également très bien en huile infusée, en baume, en lotion ou en compresse.

Quelle que soit la façon dont vous le préparez, le plantain est une plante de premier choix pour soigner les plaies. Il est riche en mucilage (surtout P. major) et en composés anti-inflammatoires, ce qui lui confère des propriétés émollientes (adoucissantes), apaisantes et hydratantes (surtout P. major). Il contient de l’allantoïne, un composé qui favorise la régénération des tissus, qui est également présent dans la consoude, mais en version beaucoup plus douce et avec des précautions particulières. Il peut donc être utilisé pour toutes sortes de petites blessures superficielles. Le plantain possède aussi des propriétés antimicrobiennes ou antiseptiques, ce qui aide à prévenir les infections pendant la cicatrisation.

Le plantain s’associe très bien avec d’autres plantes apaisantes pour la peau : le souci (Calendula officinalis), le millepertuis (Hypericum perforatum), la consoude (Symphytum officinale), la camomille matricaire (Matricaria recutita),…

Matthew Wood mentionne également l’action bénéfique du plantain sur les abcès dentaires et Jean Valnet mentionne les gingivites.

Utilisation interne du plantain

Le plantain peut également être utilisé en interne pour évacuer la chaleur et soutenir la guérison des tissus endommagés. La tisane est particulièrement utile pour calmer l’inflammation gastro-intestinale et restaurer les muqueuses abîmées. Grâce à ses propriétés à la fois astringentes et adoucissantes, il est aussi efficace pour soulager la diarrhée. En combinant ces qualités, on comprend pourquoi le plantain est souvent utilisé pour traiter des troubles comme le syndrome de l’intestin irritable, la perméabilité intestinale, la colite, l’œsophagite et les ulcères gastro-intestinaux.

Les graines et téguments de Plantago ovata (ou ispaghul) sont commercialisés sous le nom de psyllium et utilisés comme source de fibres solubles pour favoriser la régularité intestinale. Les graines contiennent encore plus de mucilage, ce qui crée une texture gélifiée qui apaise la muqueuse intestinale. En réalité, lorsqu’on consomme du psyllium ou une tisane de feuille de plantain pour soulager le tube digestif, on l’utilise toujours comme un vulnéraire topique — sauf qu’ici, c’est pour réparer la paroi intestinale plutôt que la peau !

Grâce à ses propriétés anti-inflammatoires, le plantain est aussi efficace pour apaiser les allergies respiratoires et l’asthme. Il contient des composés qui inhibent la dégranulation des mastocytes et la libération d’histamine, responsables des symptômes allergiques classiques : rougeurs, irritations, démangeaisons. C’est une autre façon de dire que le plantain calme les tissus échauffés et irrités. Il est idéal pour traiter des symptômes comme les yeux rouges, secs ou qui démangent, ou la gorge sèche avec toux irritante. Il peut aussi être utilisé contre d’autres irritations respiratoires, comme la toux sèche ou les muqueuses enflammées à cause de la fumée ou de la poussière.

La feuille de plantain possède également des propriétés diurétiques, et est parfois classée parmi les plantes « alternatives », c’est-à-dire celles qui favorisent l’élimination des déchets métaboliques. Ses propriétés rafraîchissantes et cicatrisantes peuvent aussi soutenir le système urinaire. Le plantain peut être intégré dans des mélanges pour les infections urinaires ou la cystite interstitielle.

Récolte et transformation de la feuille de plantain

Idéalement, on récolte les feuilles de plantain au printemps ou au début de l’été, avant la floraison. Mais si cette plante est disponible au moment où vous en avez besoin, n’hésitez pas à cueillir les feuilles à n’importe quel moment de l’année, même hors saison ! Pour les teintures, baumes, huiles, compresses et autres préparations de premiers soins, mieux vaut utiliser la feuille fraîche, qui est aussi excellente en infusion. Une fois séchée, la feuille est légèrement moins hydratante mais reste très utile en tisane. Si vous la faites sécher, on considère que la feuille est stable au séchage à condition qu’elle ne prenne pas l’humidité. Sinon, elle s’oxyde et noircit.

Préparations et posologie:

• Le plantain est une plante à infusion avant tout (30 g/L c’est-à-dire environ 5 g par tasse à thé).
• Teinture des feuilles fraiches ou récemment séchées (feuilles fraiches, 1:2 alcool à 80°, feuilles sèches, 1:5 alcool à 45°);
• Macérât huileux des feuilles fraîches ou quasiment séchées (évite l’humidité et la moisissure)
• Onguent ou en crème

Maintenant que vous connaissez les bienfaits de la feuille de plantain et comment la récolter, voici deux recettes ultra simples pour l’intégrer dans votre routine d’herboristerie :

Jus vert de feuille de plantain

Adapté de The Wild Wisdom of Weeds de Katrina Blair (Blair, 2014)

Ce jus vert, hydratant et riche en minéraux, est une excellente façon de commencer la journée ! Pas besoin de se limiter au plantain : vous pouvez y ajouter du pourpier (Portulaca oleracea), du mouron des oiseaux (Stellaria media), de l’ortie (Urtica dioica), ou d’autres feuilles comestibles sauvages. Cette recette donne 2 portions.

Ingrédients :

• 2 portions de feuilles fraîches de plantain (Plantago spp.)
• 3 portions d’eau

Préparation :

1. Mettez les feuilles de plantain, l’ortie et l’eau dans un blender. Mixez à puissance maximale pendant 1 à 2 minutes.
2. Filtrez pour récupérer le jus et compostez la pulpe végétale (ou gardez-la pour le masque ci-dessous !)
3. Dégustez tel quel ou sur glace.

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Masque facial à la feuille de plantain

Adapté de The Wild Wisdom of Weeds de Katrina Blair (Blair, 2014).

Quelle meilleure façon d’utiliser la pulpe restante de votre jus vert du matin ? Ajoutez un peu de soin à votre routine avec ce masque visage apaisant et réparateur ! (Évitez cependant de l’utiliser si votre jus contenait des feuilles d’ortie.)

Ingrédient :

• Pulpe de feuilles de plantain (recette précédente)

Préparation :

1. Appliquez une couche généreuse de pulpe sur le visage propre et sec. Laissez poser 10 à 15 minutes (le masque restera légèrement humide).
2. Rincez à l’eau tiède et séchez votre visage en tamponnant doucement avec une serviette.

Bibliographie et sitographie

• CABI. Plantago lanceolata. Invasive Species Compendium. Retrieved from www.cabi.org/isc
• Blair Katrina The Wild Wisdom of Weeds, 2014
• Fournier, Dictionnaire de Plantes Médicinales et Vénéneuses de France, 1947
• Leclerc, Précis de Phytothérapie, 1973
• Wood Matthew, The Practice of Traditional Western Herbalism, 2004.
• Weiss Fintelmann, Herbal Medicine, second edition revised and expanded, 2000